Visite de Nendo Rinpoché

4 juin 2018Les Chroniques de l'Institut

La méditation de la tête aux pieds

« Je partage avec vous mon expérience et ce qui peut vous être bénéfique. » Nendo Rinpoché est jovial, mais profond ; il est énergique, mais apaisant ; il est direct et pourtant doux ; il parle volontiers, mais il écoute avec attention. Il nous dit : « Le samsara est un cycle qui tourne sur lui-même, sans fin : le matin, on se sent bien et, le soir, on est mal ; le jour suivant est agréable, mais il finit en déprime. C’est incessant. On passe encore et encore de haut en bas et de bas en haut. Nous devons nous détacher de ce cycle. Et pourtant, c’est en s’appuyant sur le samsara que l’on peut s’en libérer. Il faut observer son fonctionnement et le comprendre en profondeur. »
L’enseignement porte sur la méditation. L’approche est pragmatique. On pourrait dire que Rinpoché enseigne la méditation de la tête aux pieds : les jambes sont le renoncement, la tête est la dévotion et le corps de la pratique est la méditation elle-même. Mais Nendo Rinpoché redéfinit les termes.

Pour le renoncement, il explique que nous devons prendre conscience de notre situation dans le monde ainsi que de notre fonctionnement intérieur afin de voir comment ils génèrent de l’insatisfaction. Pour nous aider à mener une telle réflexion, il nous rappelle la réalité de l’impermanence et le processus de la causalité, la succession infinie des expériences agréables et désagréables qui sans cesse nous emportent, etc. C’est ainsi que nous nous détournons naturellement de la souffrance et de ses causes. Mais il nous connaît bien. Il dit à propos de l’impermanence : « Nous n’aimons pas entendre parler du changement : personne n’aime se sentir vieillir ou voir les choses stables se transformer, etc. Si on nous dit que nous ne faisons pas notre âge, nous sommes réjouis. Quand on nous dit que tous les phénomènes conditionnés sont impermanents et que donc nous aussi allons mourir, nous n’aimons pas l’entendre et nous résistons. Mais il ne sert à rien de remettre ce fonctionnement en question. Nous allons tous mourir ! » C’est la simplicité et le bon sens qui l’emportent.

À propos de la dévotion, il montre la progression. On commence par cultiver la confiance. En quoi ? En notre capacité à nous libérer de l’illusion par la mise en œuvre des instructions. Quelles instructions ? Celles du Bouddha. Qui nous donne accès à ces instructions ? Le lama, motivé par la bienveillance. Une réflexion bien menée sur les instructions nous fait passer de la confiance à une profonde conviction. La relation au lama, imprégnée de la confiance et de la conviction, se fait alors dévotion, une reconnaissance au-delà des mots. La dévotion ne se fabrique pas, elle ne se force pas, elle naît d’un processus naturel, d’une relation au lama qui s’approfondit avec la pratique.
En ce qui concerne la méditation, Nendo Rinpoché reste pratique : « Quand on se dit ”je vais méditer”, le fait de se le dire génère une tension. On s’imagine qu’il faut alors tenir son esprit sur le support. Cela ne va pas aider à le calmer. Il s’agit de détendre l’esprit, de juste être là ; on pourra alors observer l’esprit de manière plus claire et directe, jusqu’à reconnaître l’essence des pensées. Méditer ne consiste pas à verrouiller l’esprit comme dans une boite. Méditer, c’est s’ouvrir et être de plus en plus conscient, de plus en plus connaissant. Notre esprit a pris des plis afflictifs à cause des habitudes ; la méditation va le libérer de ces plis. »

Voilà comment le renoncement, la dévotion et la méditation bien compris forment le corps complet de la pratique qui nous amène vers plus de clarté et, à terme, vers la libération et l’éveil. C’est ce qu’explique la « courte prière à Dorjé Chang » dont Nendo Rinpoché s’est inspiré pour enseigner. Un texte qui décrit en quelques vers les conditions à rassembler pour une juste pratique méditative.

Rinpoché utilise beaucoup de métaphores. Pour expliquer comment l’équilibre entre la détente et l’attention est nécessaire pour conduire la méditation, il prend la voiture comme exemple. Au volant, il faut être détendu tout en restant alerte. S’il y a de l’inattendu, comme une biche qui traverse la route, nous sommes prêts à freiner. Nous captons ce qui se passe sans le suivre. Si nous suivons la biche, nous finirons dans un arbre. Il en va de même pour la méditation, il s’agit de cultiver une conscience ouverte, une détente attentive.

Un dernier point. Pour méditer, il est nécessaire de rassembler les conditions favorables à la pratique et de rester loin de l’agitation, cela permet d’engranger de l’expérience. Mais ensuite toute situation sera l’occasion d’évaluer notre méditation. Dans l’activité, serons-nous sensibles aux critiques et aux compliments, par exemple ? Être plus ou moins déstabilisés par les conditions extérieures nous montre où nous en sommes de l’expérience méditative. Finalement, au fil de ces cinq jours d’enseignement, Nendo Rinpoché nous ramène aux trois piliers de la pratique : l’étude, la méditation et l’activité.

Puntso, responsable du programme de Dhagpo

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