"Mercredi 29 juillet, un jour placé sous le signe de la pratique de Tchenrézi. "

Mercredi 29 juillet, un jour placé sous le signe de la pratique de Tchenrézi. Thayé Dorjé, Sa Sainteté le XVIIe Gyalwa Karmapa, en a transmis l’initiation à plus de 1900 personnes rassemblées dans le grand chapiteau.
Néanmoins, avant de procéder au rituel proprement dit, Karmapa souhaite enseigner à nouveau sur la compassion, comme il l’a déjà fait la veille. Il ne le répétera sans doute jamais assez, mais l’essence véritable du bouddhisme est la pratique de la compassion. Nous risquons malheureusement de l’oublier et de nous laisser fasciner par les aspects extérieurs de ce chemin – en l’occurrence les rituels, qui sont particulièrement mis en avant dans le vajrayana. Le cœur de la pratique, la compassion, peut nous paraître difficile à appliquer mais de nombreuses méthodes existent pour nous y entraîner et elles sont à notre portée. Pour illustrer l’importance de cette qualité qu’est la compassion, Karmapa démontre qu’elle est essentielle à notre existence. Sans elle nous perdrions tout espoir, tout sens, assure-t-il. Il explique que la compassion est présente en chaque être sans exception, et ce depuis la naissance. Même dans ses formes les plus basiques que sont l’affection ou la bienveillance. Même limitée à certains êtres soigneusement sélectionnés dans la catégorie « j’aime ». Et c’est une très bonne nouvelle, car Karmapa rappelle qu’elle est la fondation de tout développement spirituel (c’est en effet une des causes de l’éveil, comme il l’a précisé la veille). Cependant, la compassion ne doit pas demeurer une sorte de noble idéal : il est essentiel de l’éprouver réellement. Il peut arriver que la compassion ou la dévotion soient confondues avec un banal attachement. Karmapa met en garde contre cette erreur et indique le moyen de distinguer l’attachement de la compassion ou de la dévotion. Lorsqu’il s’élève, l’attachement est bien trop subtil pour être perçu, mais il est possible de mener une investigation par la suite. Si le sentiment qui s’est manifesté est basé sur un intérêt personnel, un souci de soi, alors il s’agit de l’attachement. À l’inverse, la compassion est totalement désintéressée. Karmapa nous encourage à garder cela à l’esprit, tout en essayant de cultiver cette précieuse qualité car elle est fondamentale et c’est une grande source de bien. La pratique de Tchenrézi va nous y aider. C’est une méthode réellement efficace et chaque mot du rituel est chargé de sens, de valeur.

"L’essence véritable du bouddhisme est la pratique de la compassion."

Ayant posé les fondations indispensables à une bonne compréhension de cette qualité que nous essayons de déployer, Karmapa peut procéder à l’initiation l’après-midi même. Qu’est-ce qu’une initiation ? C’est une transmission qui se fait dans le cadre du vajrayana auprès d’un maître l’ayant lui-même reçue d’une lignée ininterrompue depuis le Bouddha, et qui est un pré-requis nécessaire à la pratique d’un yidam. On peut alors se demander ce qu’est un yidam ! Bien que ce mot tibétain soit généralement traduit « divinité », un yidam est en fait un support qui relie (dam) l’esprit (yi) à la dimension éveillée. Il ne s’agit pas d’une entité qui existerait réellement à l’extérieur de nous ; c’est tout simplement l’expression des qualités éveillées présentes en nous mais non actualisées pour le moment. Karmapa indique d’ailleurs à l’auditoire que les attributs de Tchenrézi (et de tous les yidams) sont symboliques – ses quatre bras, par exemple, font référence aux quatre pensées illimitées : amour, compassion, joie, équanimité. L’initiation est donc une transmission d’esprit à esprit qui autorise le disciple à méditer sur le yidam et lui offre des conditions favorables à sa réalisation. On dit traditionnellement que le maître « plante une graine », mais c’est au disciple d’en prendre soin et de la faire mûrir (comprenez par là : de cultiver les qualités que représente le yidam) ! Si l’initiation de Tchenrézi paraît simple, comparée à celle de Gyalwa Gyamtso qui fut transmise par Shamar Rinpoché pendant deux jours en 2013, elle n’en est pas moins profonde. C’est elle qui permettra à ceux qui l’ont reçue de développer de plus en plus de compassion – le cœur de la pratique du Dharma ! – et de dissiper ce qui voile cette qualité naturelle, innée, de l’esprit.

"Il ne s’agit pas d’une entité qui existerait réellement à l’extérieur de nous ; c’est tout simplement l’expression des qualités éveillées présentes en nous mais non actualisées pour le moment."

Ce jour-là, l’initiation elle-même dure près de trois heures… Et il en faudra encore presque deux pour que tout le monde passe devant Karmapa pour recevoir la bénédiction ! Mais qu’importe le temps lorsque l’on est en présence d’un tel bodhisattva. Lui-même incarne cette sublime qualité qu’est la compassion. Comme à son habitude, il demeure souriant et attentif jusqu’au bout, sans se soucier de la fatigue. Il est, à n’en pas douter, la principale source d’inspiration de tous les aspirants bodhisattvas réunis sous le chapiteau.

"Comme à son habitude, il demeure souriant et attentif jusqu’au bout, sans se soucier de la fatigue."
Article préparé avec la contribution de lama Puntso.
© Photos : merci à Gérard Truffandier et Tokpa Korlo

Site officiel de Karmapa : karmapa.org